Gestion des déchets à Bamako, un casse-tête pour les autorités publiques
La capitale du Mali, Bamako, est une ville charmante et verdoyante, coupée en deux par le majestueux fleuve Niger qui sillonne le pays d’Ouest à Est. C’est une ville de marchands, d’artisans et de musiciens, une ville qui parle maintes langues et recèle le patrimoine culturel d’un grand carrefour situé entre le tropique du Cancer et l’équateur. Pour certains, c’est aussi la ville où les dimanches sont célébrés les mariages.
Il y a lieu de rappeler que Bamako est aussi la ville de la fameuse Convention entrée en vigueur en 1998 et qui porte son nom. Sous l’égide de l’Union Africaine, nombreux pays du continent se sont concertés pour donner une réponse multilatérale à l’importation de déchets dangereux en provenance de pays industrialisés. La Convention de Bamako vise à protéger la population et l’environnement des effets néfastes de la pollution « délocalisée » et représente un grand succès de gouvernance internationale de déchets toxiques.
Ironie du sort, aujourd’hui la ville dont le nom est attribué à cette Convention phare plonge littéralement dans les déchets. Les ordures s’amassent aux bords des routes, les emballages plastique de tout genre bouchent les caniveaux où les eaux usées stagnent, les piles de détritus poussent comme champignons à peu près dans tous les quartiers. Les riverains, souvent impuissants face à l’avancée de cette marée d’immondices, sont contraints à incinérer les poubelles devant leurs maisons. Résultat : la pollution de l’environnement urbain, déjà aggravé par le nombre incalculable de véhicules d’ancienne génération circulant à Bamako, devient une véritable question de santé publique.
Nul ne doute que la gestion des déchets solides soit une priorité absolue pour une grande ville en expansion comme Bamako. Dans un rapport des Nations Unies, on constate que la moitié des déchets solides produits dans la capitale ne sont ni ramassés, ni traités, et que dans tous les cas la majorité finit dans des dépotoirs anarchiques. L’aspect accablant de cet état de faits est que de tels dépotoirs se trouvent souvent en milieu urbain. A en faire les dépens sont surtout les quartiers défavorisés et les banlieues. Une petite balade à Lafiabougou ou à Koulouba permet de saisir l’ampleur du problème.
La presse locale s’est emparé du sujet qui fait souvent la Une. Frustrés par la dégradation de l’environnement urbain, les journalistes pointent du doigts les autorités : voilà trois ans, le gouvernement a signé une convention avec OZONE Maroc mais la mise en œuvre demeure défaillante. Le dépôt final n’est toujours pas opérationnel et les agent d’OZONE sont obligés de faire le tour des banlieues pour déverser des tonnes de déchets. La réponse de plusieurs mairies a été une série de propositions ayant abouties sur un « programme d’urgence d’assainissement de Bamako », qui, tout de même, semble loin de changer la vie des bamakois dans l’avenir proche.
Nonobstant le portrait désolant, force est de constater que le sujet fait débat à tous les niveaux et que les citoyens s’impliquent dans des initiatives visant à nettoyer leurs espaces de vie. La situation est sans doute difficile mais la prise de conscience représente le premier pas sur le chemin du changement. Inch’Allah.
Je me suis aperçu de la gravité du problème de mes propres yeux dès l’arrivée et je me demande si les ONG présentes au Mali plaident pour qu’il soit mis à l’agenda. Une approche intégrée permettrait d’amorcer une riposte adéquate et fournir un soutien efficace aux instances locales. Quoi qu’il en soit, j’espère vivement que notre organisation prenne la relève et puisse un jour s’y attaquer. Prendre soin des populations en détresse signifie prendre soin de leur environnement aussi.
Article rédigé par Samuele Masucci, EU Aid Volunteer en Mali.